Le Congrès du Snacking décrypte les grandes tendances de la restauration rapide
La restauration rapide, en 2025, aborde une phase charnière. C’est ce qui ressort principalement du dernier Congrès du Snacking qui s’est déroulé à Paris la semaine dernière. Si le chiffre d’affaires des 150 principaux acteurs chaînés atteint pour la première fois le cap des 19,9 Mds€ en 2024, signe d’un retour apparent à la normale post-crise, les signaux d’alerte ne manquent pas. Fréquentation en repli, panier moyen sous tension, guerre des prix exacerbée, fragmentation des repas, pressions économiques et géopolitiques, arbitrages des consommateurs constants… Dans ce contexte, le snacking reste une valeur sûre, mais doit se réinventer. Agilité, créativité et capacité à casser les codes pour séduire des consommateurs très volatiles seront les clés d’un “ReBoost” et d’une relation durable… Malgré un contexte économique incertain, la restauration rapide s’est imposée en 2024 comme un pilier solide du hors-domicile. En signant une croissance de + 5 % (Enquête Top 150 des Majors de la Restauration Rapide par France Snacking) à périmètre constant par rapport à n-1. Derrière cette embellie apparente, le marché ne se contracte pas, mais se fragmente, tiraillé entre guerre des prix et fréquentation plus sélective. « La reprise post-Covid est derrière nous : la fréquentation des restaurants s’est stabilisée en 2024 », analyse Maria Bertoch de Circana. Mais comparée à 2019, la restauration hors domicile accuse encore un recul de 8 % des visites, avec une restauration rapide qui continue de grignoter du terrain sur la restauration à table, ajoutent l’experte et sa collaboratrice Julia Lopez, grâce aux données recueillies via leur baromètre paneuropéen. Dans ce paysage mouvant, le digital devient central : pour fluidifier les opérations, affiner la relation client et enrichir l’expérience. « L’enjeu n’est plus seulement de nourrir, mais d’apporter une nouvelle dimension aux services », résume Christophe Gaschin, Directeur Général du Groupe Bertrand. Mais cette transformation ne pourra se faire sans une revalorisation humaine en profondeur : « Rémunération, bien-être, formation, perspectives… Le secteur doit redevenir attractif en revalorisant ses ressources essentielles. »
La restauration rapide, LA locomotive du hors-domicile
Derrière une stabilité de façade, le marché connaît de vraies recompositions. Seule la restauration rapide a dépassé son niveau pré-Covid, avec + 3 % de fréquentation en 2024 vs 2019 (Circana). Elle tire l’ensemble du secteur, tandis que la restauration à table reste à la traîne (- 22 % de visites), tout comme la restauration collective ou les ventes en mobilité. Résultat : la part du fast-food dans les visites hors domicile grimpe à 70 %, contre 64 % en 2019. « Manger sur le pouce est entré dans les mœurs, dopé par des consommateurs pressés et épris de praticité », résume Maria Bertoch (Circana). Mais les arbitrages se durcissent. « Pris entre deux guerres, économique et géopolitique, le consommateur hiérarchise ses dépenses pour la première fois. C’est une rupture. À nous de lui redonner envie par la qualité de nos produits et de nos services », alerte Christophe Gaschin. Ca bouge aussi sur tous les front et la porisité entre les univers de la restauration n’a jamais été aussi marquée avec notamment la montée en puissance des circuits dits alternatifs. « Les supermarchés de proximité (la Proxi) sont devenus des acteurs à part entière du snacking », confirme Maxime Briquet de Kantar, tout comme les boulangeries indépendantes, devenues des piliers incontournables de la pause déjeuner à la française. « Le concept Oxygène, déployé dans 60 unités dédiées au snacking et aux produits essentiels depuis un an, nous permet de générer 25 % de ventes additionnelles et d’atteindre 40 % de taux de prise en snacking. C’est une nouvelle façon de penser la proximité, par l’agilité et la lisibilité de l’offre. » explique Vincent Doumerc de Franprix.
De nouvelles habitudes, de nouvelles cibles… et autant d’opportunités à saisir pour le snacking !
La consommation hors domicile se transforme en profondeur. Les repas se déstructurent, les pauses se multiplient (jusqu’à 6 prises par jour) et les moments hors repas traditionnels (petit-déjeuner, goûter) progressent. Le mot d’ordre : rapidité. 70 % des visites en fast-food durent moins de 15 minutes, contre 64 % en 2019 (Circana 2025). En parallèle, les produits prêts-à-consommer ont le vent en poupe : 59 % des foyers utilisent des produits pratiques, et 41 % cherchent à réduire le temps passé en cuisine (Kantar 2025). « Manger vite sans sacrifier le plaisir : c’est tout le pari du snacking et du prêt-à-emporter », confirme Maxime Briquet (Kantar), qui souligne aussi que l’urbanisation accrue ouvre de nouvelles perspectives pour les commerces de proximité. Autre mutation forte : les seniors prennent goût au snacking. Les plus de 65 ans représentent 11 % des visites, contre 5 % en 2019. Ces “young seniors”, actifs et décomplexés, compensent en partie la baisse des 25–45 ans, moins présents en raison du télétravail ou de contraintes budgétaires. Résultat : offres kids, menus seniors, services adaptés… les enseignes ajustent leur copie pour rester en phase avec une clientèle de plus en plus diverse et aux attentes toutes différentes au même moment ! Ce qui n’est pas sans conséquence sur la délivrabilité des produits : « Grâce à des étiquettes personnalisées, sans silicone et compostables, connectées à la commande en ligne, on fiabilise la remise et la personnalisation client, on allège la charge opérationnelle et on sécurise la chaîne logistique en période de rush », justifie Jérémy Lagay de Iconex Europe.
Pricing dynamique et menu engineering : les armes fatales du snacking 2025 et au-delà
Dans un contexte inflationniste, les consommateurs scrutent les prix, traquent les promos et n’hésitent plus à tester de nouveaux restaurants : 39 % ont découvert un nouvel établissement en 2024 (Circana) et choisissent leur destination au dernier moment ! Menus « mini prix », offres thématiques, portions généreuses, refills… la restauration rapide riposte avec une stratégie offensive. « Ces logiques d’access price sont devenues la norme, y compris chez les opérateurs les plus traditionnels », constate Michael Ballay de Food Service Vision. Chez les distributeurs, les promos explosent : + 44 % début 2025, + 154 % sur les bonbons, + 32 % sur le poulet pané… quand les promotions sur le bœuf chutent de 16 %. « Le poulet est devenu la star : convivial, économique, plus léger et halal…», analyse Michael Ballay. Mais la vraie révolution est dans l’offre : menu engineering + pricing dynamique forment désormais le duo gagnant. Fini les cartes figées. Place à un socle de best-sellers enrichi d’animations saisonnières. « Il faut arrêter de penser carte à l’ancienne », insiste Christophe Gaschin. Le pricing dynamique, inspiré du yield management, s’impose alors que d’autres secteurs comme le tourisme ont éduqué le consommateur : « On passe du fixe au “every day, every hour” », explique Clara Soppo Priso de Simon-Kucher & Partners. Mais encore faut-il connaître ses clients : CRM, data et APIs deviennent des prérequis pour piloter l’offre avec justesse. Dans cet univers normé du mix marketing, deux stratégies se dessinent : une offre défensive à 5 €, pour rester accessible et une offre offensive, fondée sur la générosité et l’expérience. « Le client ne fuit pas le prix, mais l’absence de valeur », conclut David Giraudeau de La Mie Câline. Et parfois, il est prêt à payer 20 € pour un déjeuner express servi à table… si les services et le plaisir suivent !
Le 15e Congrès du Snacking est organisé par France Snacking en partenariat avec : Bridor, Cafés Richard, Crisalid, Enodis France, Iconex, Malou, METRO France, Oatly, Poule et Toque, RISSO France et les soutiens de la Fédération des Entreprises de Boulangerie Pâtisserie (FEB), le GECO, le Leaders Club France, le Snack Show, la Fédération des Entreprises et Entrepreneurs de France (FEEF) et le SNARR.
Texte : Pascal Perriot
Photos : Laurent Estèbe
La newsletter
Pour ne pas perdre une miette de l'actualité Boulangeries-Viennoiseries-Pâtisseries, rejoignez nos lecteurs !