La filière fait front face à la crise liée au Covid-19 !

«Les boulangeries restent ouvertes pendant le confinement. J’invite tous les Français à acheter leur pain en boulangerie. La profession est fortement sensibilisée aux règles d’hygiène. Le pain est cuit à haute température, ce qui élimine le Covid-19 ». Tel fut le message posté début avril par Bruno Lemaire, Ministre de l’Économie et des Finances. Un petit rappel pour soutenir en terme de communication, la filière qui traverse une période critique. Notre pays fait en effet face à l’une des plus graves crise sanitaire et économique jamais rencontrée. Pourtant, il faut constater que notre filière blé-farine pain, en règle générale, est restée au contact des consommateurs et fait front. Beaucoup de nos artisans, réseaux et laboratoires de Grandes Surfaces Alimentaires sont restés ouverts pour fournir aux Français des pains, viennoiseries et pâtisseries. La plupart ont adapté leurs horaires (souvent ouverts de 8 à 13 H), leurs conditions d’achats (plafond CB abaissé), et préparé leurs équipes (gants, gels hydroalcooliques, visières), faisant preuve de réactivité et d’ingéniosité en ce qui concerne l’accueil des clients (marquage au sol et affichage COVID19). Lors d’un entretien à snacking.fr, François Bultel, co-fondateur de Boulangerie Ange précise même que « Nos consignes de sécurité Covid-19 se sont articulées autour de 4 axes : le port obligatoire de la visière en plexiglass Ange pour 100 % des personnes à la vente et si possible à la production. Protections efficaces et personnelles que nous avons demandé de désinfecter toutes les 2 heures ou à chaque reprise de poste. Pour le port des gants, obligatoires en vente et changés toutes les 30 mn, il a été demandé d’ajouter un lavage des mains systématique également toutes les demi-heures et/ou chaque changement de recette, côté production. Un renforcement de la désinfection a été mis en place et notamment le nettoyage/désinfection, via une vaporisation des poignées de portes (clients et personnels) et des tours de caisse, côté vente ainsi que des surfaces sensibles, côté laboratoire.» L’enseigne a gardé ouvertes 151 de ses 155 boulangeries durant le confinement, les seuls 4 points de ventes fermés, le sont par obligation étant situés dans des centres commerciaux. Une chose est sûre, une fois la crise passée, la question sanitaire dans nos boulangeries devra répondre à des normes encore jamais atteintes ! Un mal pour un bien ?

Les ventes de snacking et de pâtisseries se sont écroulées ! Celles de farine ménagère et de levure fraîche ont explosé…

Côté vente, si le snacking s’est effondré d’environ 75 % et la pâtisserie de 60 %, seul la production de pain et de viennoiserie permet d’assurer des volumes corrects, avec une gamme resserrée au maximum. Certaines enseignes de boulangerie prennent également de nombreuses initiatives originales, comme la Maison Kayser. Cette dernière a en effet proposé dans sa boulangerie du boulevard Diderot, près de la Gare de Lyon à Paris, un panier de légumes d’un maraîcher bio du Puy-Notre-Dame, près de Saumur (Harald Un Cheval un Champ), composé d’au moins 7 légumes de saison (carottes bottes, blettes cardes, poireaux, chou, salades, fenouil, ail…etc.). A commander et récupérer en boutique pour 18 € ! Il faut aussi faire face à l’explosion des ventes de farine ménagère. « Nous avons toujours eu une ligne spécifique pour la farine ménagère, et là, elle tourne à plein régime », précise David Bourgeois, des Moulins Bourgeois en Seine-et-Marne. Le meunier qui livre toute l’Ile de France, voit une envolée des ventes de paquet de farine de 1 kg. « On s’aperçoit que les linéaires de la GMS sont vides et beaucoup de clients de nos artisans leurs demandent des sachets de farine. Les gens sont confinés. Ils ont ressorti les machines à pain ! Et certains de nos boulangers vendent jusqu’à 50 kg de farine ménagère quotidiennement », affirme encore David Bourgeois. Pour les Grands Moulins de Paris et sa marque leader Francine ou encore Axiane Meunerie qui livrent la GMS, les lignes de production de farine tournent aussi à plein avec des équipes qui travaillent 6 jours sur 7. Il faut dire que beaucoup de farines de 1 kg proposées en grandes surfaces étaient d’origines allemandes ou italiennes… avec la crise dans toute l’Europe, les rayons ont donc du mal à être réapprovisionnés ! En moyenne, depuis le début du confinement, on observe une augmentation des ventes de farine ménagère d’environ 170 % ! Autre produit sous tension, la levure ! Que ce soit dans des enseignes comme Carrefour ou Leclerc, on occupe l’espace libéré par la pâtisserie fraîche en forte baisse, pour augmenter celle de la levure fraîche qui explose d’environ 150 % ! D’autre part, la situation actuelle a généré de nombreuses actions pour soutenir nos soignants. C’est le cas de la Maison Bécam qui a fermé 2 de ses 8 boulangeries situées dans le Maine-et-Loire. L’entreprise de Nicolas Bécam s’est donc réorganisée avec 80 salariés au travail sur 120 habituellement. Le boulanger a joué la carte de la solidarité et a décidé de confectionner des sandwiches pour le CCAS d’Angers, pour les soignants et pour les associations, avec ses stocks de pâtisserie et de snacking dont elle disposait encore dans ses réfrigérateurs. Rodolphe Landemaine, Délifrance, Bridor, Paul, et beaucoup de professionnels de la filière ont initié de nombreuses opérations de soutien à nos forces vives en première ligne de la lutte contre le virus.

Le click & collect et le click & delivery ont la cote !

Puis, si la crise liée au confinement a montré la réactivité des boulangers-pâtissiers, elle a aussi mis en lumière la montée en puissance de la digitalisation et surtout de la livraison à domicile. De nombreuses enseignes travaillent ainsi avec Deliveroo et autres Uber Eats pour fournir leurs clients. C’est le cas pour Boulangerie Ange. « Nous avons constaté une augmentation de l’activité via UberEats (Une cinquantaine de magasins y font appel) et un développement de nos ventes click & collect », précise François Bultel, co-fondateur de l’enseigne, lors d’une entretien à snacking.fr. De son côté, le leader des réseaux de boulangerie Marie Blachère (plus de 500 points de vente en France), vivement critiqué pour avoir fermé ses points de vente au tout début du confinement, s’est ravisé et a même lancé le 2 avril son système de click & collect pour l’ensemble de son réseau. On y trouve une gamme réduite, et, exceptionnellement pendant cette période de confinement, le retrait des commandes en boulangerie ne se fait qu’entre 9h et 13h. Les clients sont ainsi amenés à payer en ligne au préalable et privilégient ainsi le sans contact. Les Moulins Soufflet, qui ont lancé en novembre 2019 leur site « maboulangerie.com”, incitent leurs clients boulangers à l’utiliser en cette période critique. Une « web application » pour permettre aux artisans de digitaliser leur point de vente et ainsi offrir plus de services à leurs clients. Cette web application est entièrement personnalisable pour que les boulangers artisans puissent créer leur site web à leur nom et à leur image. Mais surtout, grâce à maboulangerie.com, les artisans peuvent proposer du click & collect et du click & delivery. Du côté de la meunerie, après une demande très forte lors de la première semaine de confinement, à laquelle il a fallu répondre avec des livraisons soutenues, la fièvre est retombée brutalement. Désormais, la plupart des meuniers ont vu leur production baisser de 30 % en volume, même si la plupart des équipes sont au complet dans les moulins. Les équipes administratives et commerciales fonctionnent, quant à elles, souvent en télétravail. Leur rôle est désormais d’accompagner leur clients dans cette difficile passe et de préparer d’ores et déjà la reprise d’activité après la fin du confinement. « Il faudra que les meuniers soient prêts à accompagner leurs clients dès que la fin du confinement sera décrétée, pour remettre en ordre de bataille toute la filière d’approvisionnement et de livraison », affirme David Bourgeois.

Les industriels s’adaptent aux besoin du marché face à la crise

Enfin, chez les industriels, la situation est aussi très compliquée. Si l’exportation a brutalement chuté, le marché intérieur tourne au ralenti. La production de pain est privilégiée au détriment de la viennoiserie et de la pâtisserie. C’est particulièrement le cas pour Vandemoortele, qui annonce que son activité est maintenue dans sa quasi intégralité, mais qu’elle s’est adaptée aux besoins du marché. « Ainsi l’entreprise a réorganisé son activité pain, en progression, pour répondre à la forte demande de ses clients, alors que la viennoiserie, pâtisserie et les donuts sont eux en recul ». Si la grande distribution, les artisans et les chaînes de boulangeries continuent d’opérer, en revanche, l’industriel précise que le marché de l’hôtellerie et de la restauration hors domicile est quant à lui à l’arrêt total. Les ingrédientistes sont aussi de la partie. Ils ont dû également réorganiser leurs équipes sur le terrain pour soutenir et accompagner leurs clients meuniers et boulangers. Enfin, du côté des instances, la FEB (Fédération des Entreprises de la Boulangerie) a demandé dès le 17 mars au gouvernement que les boulangeries puissent ouvrir 7 jours sur 7. Appel bien reçu puisque ce fut chose faite dans la foulée. « C’est une décision forte de la part du gouvernement pour fluidifier les attentes des consommateurs. Nos entreprises ont conscience d’être en première ligne de cette crise sanitaire sans précédent, elles sauront se mobiliser et être à la hauteur », a indiqué Matthieu Labbé, Délégué Général de la FEB. Le syndicat qui représente 280 entreprises du secteur de la boulangerie-viennoiserie-pâtisserie, a également relayé un “Guide Travail en Boulangerie” (un kit de lutte contre le covid-19 destiné spécialement aux boulangeries préparé par le Ministère du Travail), ainsi qu’un “Vademecum par Temps de Crise” qui a été rédigé le 24 mars dernier et qui reprend plusieurs informations concernant les questions liés à la crise du coronavirus. Sans oublier un “Guide de Continuité de l’Activité Industrielle et Mesures de Prévention” qui donne et renforce les consignes de l’Etat concernant les activés industrielles, disponible sur leur site Internet.